Cérémonie des Vœux 2025

Jeudi 23 janvier 2025 - Rochetaillée-sur-Saône

Chers Amis,

Bienvenue à la cérémonie de mes vœux !

Alors oui, bien sûr, ça pourrait être des vœux politiques. Mesdames et messieurs les maires, élus, corps constitués : nous ne comptons déjà plus le nombre de vœux auxquels nous avons assisté depuis deux semaines environ et au cours desquels nous nous sommes croisés !

Si chacun des maires en particulier se plie naturellement à l’exercice, ce sont toujours de très bons et beaux moments. Pour ma part, j’ai déjà été à une quinzaine de vos vœux, chers maires. Et d’ici la fin du mois, je pense que j’aurai réussi à aller à plus d’une vingtaine. Je n’ai hélas pas pris comme bonne résolution 2025 de me remettre au sport mais je peux vous assurer que je sais courir partout !

Et je vous assure que, malgré ce marathon je tiens à ces cérémonies de vœux des maires. C’est l’occasion pour moi, évidemment de connaître les projets dans chacune de vos communes ; mais également, et presque surtout, c’est l’occasion pour moi d’échanger avec vous autour des verres de l’amitié qui clôturent systématiquement ces moments.

En ce qui concerne mes vœux, j’ai bien évidemment hâte de vous retrouver après !

Mais cette soirée est aussi l’occasion de vous dire qui je suis. Et ce en quoi je crois.

De vous exprimer mes doutes. Mes réflexions. Mes désaccords.

Et ce qui m’anime profondément. Ce qui me porte, somme toute.

Donc ce sont aussi des vœux très personnels, d’une certaine manière. Très loin de vœux convenus.

Alors si vous vous attendez à que je vous déroule la liste de tout ce que j’ai fait en circonscription et à l’Assemblée, que je vous détaille dans une sorte de liste à la Prévert tous les textes que j’ai déposés et qui portent mon nom – et qui ne seront jamais étudiés –, le nombre d’amendements que j’ai rédigés – juste pour faire grimper « mes statistiques »–, ou encore mon nombre de prises de parole–pour ne rien dire mais faire des « capsules video sur mes réseaux »– : vous risquez hélas d’être fort déçus.

Mais… Mais si vous venez pour qu’on essaie de réfléchir ensemble, si vous venez pour vous trouver dans un collectif qui essaie de se tirer vers le haut et d’embarquer tout le monde : vous êtes au bon endroit.

Bienvenue donc, à chacune et chacun d’entre vous, pour cette belle soirée que nous allons passer ensemble !

Je tiens à remercier Eric Vergiat, maire de Rochetaillée-sur-Saône, de nous accueillir dans cette magnifique salle. Monsieur le maire, cher Eric, je te laisse avec plaisir la parole pour le traditionnel mot d’accueil.

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[ Mot d’accueil de M. Eric Vergiat, maire de Rochetaillée-sur-Saône ]

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Embarquer tout le monde.

Et les images qui tournaient pendant que vous arriviez vous ont aussi embarqués dans mon quotidien, que ce soit à l’Assemblée nationale ou dans nos belles contrées.

« Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas tes hommes et femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose. Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le coeur de tes hommes et femmes le désir de la mer ». nous enseigne Antoine de Saint-Exupéry.

Faire naître dans le cœur des femmes et des hommes le désir de la mer, pour construire un bateau.

Je ne sais pas si vous avez un peu suivi le Vendée Globe – dont de nombreux participants sont encore en mer –, mais cette course est merveilleusement riche d’enseignements.

Ce désir de la mer, qui en pousse certains à s’élancer pour se dépasser. Certes personnellement. Mais pour faire vibrer un tas de monde derrière. Regardons les quais bondés aux Sables d’Olonne ! 

Si vous n’en avez pas eu l’occasion, allez voir l’arrivée du vainqueur, Charlie Dalin, mardi 14 janvier dernier.

Les images étaient magiques. Dans tous les sens du terme : vers 8h du matin. Soleil levant sur l’Océan qui semble s’embraser. Un homme seul dans son bateau, après 64 jours en mer.

Au-delà du caractère exceptionnel de cette course., un tour du monde, à la voile, en solitaire, ce qui m’a profondément frappée, ce sont les symboles qui se dégagèrent de l’arrivée du vainqueur.

Une nuée de bateaux qui l’attendent. Qui viennent à sa rencontre. Qui l’accompagnent dans le chenal. Tout petits par rapport au mastodonte qu’est le voilier monocoque du coureur.

Mais tellement unis. Ils sont là. Ils l’attendent. Et ils participent à sa victoire. A sa joie. A tout ce qu’il a enduré. Ils sont là pour l’accueillir.

Et se réjouir tous ensemble de la victoire de l’un d’eux. 

Le vainqueur porte bien plus que sa propre performance. Il embarque tout le monde avec lui. Evidemment ses équipes. Mais tellement plus encore. 

Il embarque tout le monde avec lui. Dans son rêve. Dans ses doutes, ses craintes, ses peurs. Dans ses abnégations. Dans ses combats. Et dans sa victoire. Dans ce surpassement de soi-même.

Alors, ce que nous sommes capables de réaliser pour nos héros : pourquoi ne le reproduirions-nous pas au quotidien ? Vibrer à l’unisson. Pour la victoire. Et se réjouir de la victoire de l’un de nous. Qui emporte, qui embarque notre victoire collective. Et chacun de nous, c’est un petit bout que nous prenons.

Nous sommes un individu parmi un ensemble. Et quand cet ensemble gagne : chacun de nous gagne.

C’est bien quand nous nous dépassons, quand nous exaltons ce qu’il y a dans chacun, que nous nous révélons les meilleurs. Tous ensemble. 

Et aujourd’hui ? Aujourd’hui, quel est le désir de la mer qui permet de rassembler des femmes et des hommes ? Quel est le désir assez puissant, dans nos cœurs, qui nous porterait à construire un bateau ? Pour y embarquer tous, ensemble ? Et prendre la mer ?

Pour aller plus loin et inciter des femmes et des hommes à donner le meilleur d’eux-mêmes dans la réalisation d’une œuvre collective.

Et nous savons tellement faire, quand une magnifique occasion se présente. Regardez les Jeux olympiques et paralympiques de cet été.

Regardez cette fierté partagée ! Nous étions tous derrière nos athlètes, qui ont glané médaille après médaille. Derrière nos forces de l’ordre, aussi, qui ont permis que ces jeux se déroulent sans aucun accroc.

De la magie à l’état pur. Tout ce bonheur partagé. Ça fait un bien fou.  Quel bonheur de rêver. De rêver tous ensemble. Et de vibrer pour la même chose.

Et là, ça marche : chacun ne pense plus à lui-même mais se met en mouvement pour quelque chose qui le dépasse et dans laquelle, tous, nous nous retrouvons !

Parenthèse enchantée pendant laquelle un souffle de légèreté et d’insouciance, de fierté et de communion s’est emparé de tout le pays… et bien au-delà, même. Une euphorie contagieuse avec des Marseillaise spontanément entonnées dans les stades, les cafés, dans les salons devant nos télés !

Une véritable liesse populaire. Dont nous sommes aussi tant capables !

Georges Bernanos nous disait : « Être capable de trouver sa joie dans la joie de l’autre : voilà le secret du bonheur ! »

Alors apprenons à être heureux dans le bonheur de l’autre.

Multiplions les joies partagées.

Et comme nous savons faire, ici, comme vous savez faire, vous, élus, bénévoles, dans nos villages et dans nos villes : que tout soit prétexte à se retrouver, à passer de beaux et simples moments. C’était d’ailleurs le thème de mes vœux l’année dernière, à Saint Cyr au Mont d’Or « Qu’on est bien, chez nous !». Dans nos fêtes de villages, derrière nos sportifs sur un stade, avec nos orchestres qui égaient chaque événement, dans nos défilés, à nos buvettes…

Ces petites joies partagées sont en réalité le terreau de nos liens. De notre Fraternité en action. 

Et regardez la même fierté et les mêmes émotions encore partagées autour de Notre-Dame. Toutes ces femmes et tous ces hommes qui ont donné le meilleur d’eux-mêmes dans la réalisation d’une œuvre collective. N’oublions pas cette fierté que nous avons tous ressentie d’avoir reconstruit notre monument en cinq ans. Et je peux vous assurer qu’elle est encore plus belle qu’avant.

Lors de la cérémonie de réouverture, ce qui m’a frappée, c’est l’hommage, si vibrant, si profond, à nos pompiers. Ceux qui ont sauvé Notre-Dame. Ils défilaient, ces hommes en rouge, dans la nef de la Cathédrale. Avec une simplicité déconcertante. Les applaudissements si émouvants de tous les chefs d’État réunis, de tous les cardinaux, et de tous ceux présents témoignaient non pas de réussites individuelles, mais bien d’un dépassement collectif.

De quelque chose qui n’appartient à personne… et à tout le monde.

Et tous ces charpentiers, ces tailleurs de pierre, ces forgerons, couvreurs, sculpteurs, vitraillistes, ces cordistes, dinandiers, échafaudeurs, maçons, ces facteurs d’orgue, maîtres verriers, patineurs, nacellistes. Eux aussi nous ont fait rêver. Nous ont fait vibrer. Nous ont fait nous sentir fiers. 

Alors, pourquoi n’y parvenons-nous pas davantage ? Pourquoi nous laissons-nous enfermer dans nos individualités, dans nos postures ?

Pourquoi nous montrons-nous si étriqués, vindicatifs, peureux, recroquevillés, opposés, aigris ?

Ah ça… que ne me dites-vous combien vous vous désolez de notre paysage politique. J’en entends d’ici qui disent « oui ben vous avez vu le spectacle que vous donnez ! » 

Et vous avez hélas évidemment raison. Comment voulez-vous que nous demandions aux Français d’avoir confiance en leurs représentants quand certains d’entre eux, d’entre nous, hélas, je suis obligée de dire, transmettent une image déplorable. 

En ce qui me concerne, je crois profondément à notre représentation populaire. Je crois profondément que chaque député est le représentant du Peuple. Des Français. De chacun de vous. Et de vous, de nous, collectivement. 

Mais ce à quoi nous assistons aujourd’hui est affligeant. Et j’en suis profondément triste. En vérité.

Je tiens en très haute estime la Politique avec un grand « P ». C’est une des causes les plus nobles, à mes yeux : faire en sorte que nous avancions, ensemble, malgré nos différences, malgré nos dissensions.

Trouver des chemins qui permettent de nous unir, déceler des sentiers de traverse sur lesquels nous nous retrouvons, déployer des trésors de compromis, et non de compromission. Car le compromis est une richesse. Et non une faiblesse.

Permettez-moi ici de mener avec vous une réflexion, qui, je le reconnais humblement, me préoccupe viscéralement depuis quelques temps : Je me demande dans quelle mesure notre Démocratie ne souffre pas… d’un excès de démocratie. Et c’est douloureux, quand on est profondément démocrate, de se poser cette question. Mais c’est avec la plus grande des sincérités que je me pose, que je vous pose la question. Qui plus est au regard de ce que subissent toutes les « vieilles démocraties » dans notre monde contemporain, j’y reviendrai plus tard.

Dans les échanges que j’ai avec les uns et les autres, quand je vous entends parler de certains députés et de leurs attitudes anti-républicaines, anti-démocratiques mais tout simplement… irrespectueuses et inconvenantes, je ne cesse de rappeler que eux aussi, ont été élus, et qu’ils représentent aussi une partie des Français. Comme moi. Pas plus. Mais pas moins…

Mais évidemment, cela met à mal notre Démocratie.

Nous croyions nos systèmes pour acquis. Nous pensions même – orgueil de l’Occident, il faut bien le reconnaître – qu’elles étaient un modèle qui éclaireraient tous les autres régimes.

Il va falloir que nous nous réveillions, nous, politiques. Mais aussi nous, citoyens. Car c’est aussi – et peut-être bien plus encore – en tant que citoyenne que je m’interroge. Et que je souhaite notre sursaut, notre réveil collectif. 

Car plutôt que de nous unir pour défendre notre bien le plus précieux, à savoir notre Démocratie, nous passons notre temps à nous déchirer, à adopter des postures « par principe », à refuser le dialogue. 

« Je rêve d’un pays où l’on se parle à nouveau ». Ces propos ne sont pas les miens, et ils ont 37 ans. Ce sont ceux de Michel Rocard dans son Discours de politique générale, le 29 juin 1988. 

Et ces propos peuvent tellement se coller à aujourd’hui. 

En voici des extraits :

« Aucune formation ne détient la majorité absolue dans cette Assemblée. » Vous voyez : ce n’est donc pas nouveau. Et il continue, en substance : « Les idées que nous défendons ne sont jamais si belles, si rayonnantes, que quand elles valent pour tous. Nos priorités ne sont pas celles d’une moitié de la France contre l’autre moitié, mais celles de tous les Français. Défaire ce que les autres ont fait, faire ce que d’autres déferont : voilà bien le type de politique dont les électeurs ne veulent plus ! »

Et Michel Rocard de continuer en affirmant sa « passion de la France unie » et  son rêve d’une politique où l’on soit attentif à : ce qui est dit, plutôt qu’à qui le dit. 

Il « rêve tout simplement d’un pays ambitieux dont tous les habitants redécouvrent le sens du dialogue. »

Mais maintenant, il faut que nous cessions de rêver !! Il faut que nous parvenions à mettre en œuvre cela, à mettre, à remettre tout le monde autour de la table.

Or, c’est l’engagement de l’immense majorité de vos élus. Et au premier chef, vos élus locaux. Ils font vivre cette Démocratie du quotidien, cette République de proximité ; ils écoutent, discutent, proposent, améliorent, échangent, partagent.

Je formule donc un premier vœu : que nous parvenions, à l’Assemblée, à se parler, à échanger, à dialoguer, sans invective, sans posture, sans dénigrement, en portant haut l’art du consensus et de l’écoute, avec tout le monde.

Pour les Français. Pour la France. 

Parce que notre France : elle est belle. Elle est magnifique.

Et les Français sont… tout aussi magnifiques.

En 2019, je présentais mes vœux à Lissieu, autour du thème de « Faire Nation autour de notre Douce France ».

Notre France belle de ses paysages, de ses rivières et de ses montagnes.

Si fière de son histoire, de ses conquêtes et de ses révolutions.

Patrie des droits de l’homme. La tête haute, le regard fier.

Notre France dont l’histoire est parsemée de frondes et de victoires, d’affrontements et de réconciliations, de face-à-face et de côte à côte.

Notre France de cœur qui ne supporte pas, qui n’a jamais supporté l’injustice et qui s’est toujours rebellée face aux inégalités de naissance et de destin.

Notre France tellement fière qui sait si bien unir son peuple derrière ses couleurs, lorsque celles-ci éclatent à la face du monde.

Et comment parler de la France sans parler des Français, du peuple de France ?

Ah, Notre Peuple. Fier et râleur, joyeux et bougon, parfois arrogant aux yeux de certains. Et pourtant, lumière du monde lorsque les temps s’obscurcissent…

Ce peuple qui se réclame si souvent de la France.

Mais aussi ce peuple où, trop souvent, chacun brandit sa France… plutôt que notre France.

Ce peuple qui, face aux inégalités de ce monde, réclame davantage de justice et de lois. Mais qui, sitôt qu’elles sont votées, voit trop souvent des individus les contourner.

Ce peuple qui, à raison, déteste les privilèges. Mais où trop nombreux sont ceux qui profitent encore du moindre passe-droit.

Ce peuple qui veut tout transformer. Mais dont la réticence au changement est grande dès lors que celui-ci nous concerne.

Ce peuple qui ne se contente jamais des droits qu’il conquiert et en veut toujours davantage pour toujours plus d’égalité. Mais dont certains oublient trop souvent les devoirs qui en découlent.

Cette France bariolée, ambitieuse, volontaire et passionnée.

Elle est unique notre France. Elle est précieuse.

Mais nous oublions un peu trop souvent de l’aimer…

Philippe Tesson ose exprimer que la France est un paradis peuplé de gens qui se croient en enfer.

Alors n’oublions pas de l’aimer, notre France.

Et n’oublions pas de la choyer. Et de lui donner.

N’oublions pas que nombreux, très nombreux, ont été ceux qui se sont battus pour elle. Soyons capable de nous battre, nous aussi, pour elle.

Pour tout ce qu’elle représente : la liberté, l’égalité, la fraternité.

Quel autre pays peut se revendiquer d’avoir une si belle devise ?

Ne laissons ni notre Démocratie ni notre République s’essouffler.

Nous les croyons acquises… Soyons vigilants. N’attendons pas de nous dire : « ah ! si j’avais su, j’aurais peut-être fait plus attention ».

Veillons à ce que la défiance qui gagne de plus en plus nos concitoyens – parfois à raison – que cette défiance ne se retourne finalement pas contre les citoyens eux-mêmes.

Puissions-nous parvenir à recréer ce lien de confiance.

Vous attendez, légitimement, de vos élus. Et votre vote nous oblige. Infiniment.

Mais nous ne pouvons pas faire grand chose sans vous.

Chacun est responsable. Car « être homme, c’est précisément être responsable. C’est sentir, en posant sa pierre, que l’on contribue à bâtir le monde » nous enseigne encore Saint-Exupéry.

Ne soyons pas trop passifs, à attendre de l’État, comme on peut parfois entendre. « J’ai cette difficulté, c’est à l’État de m’aider. La société doit subvenir à mes attentes ». Mais la société, c’est qui ? C’est nous tous. On ne peut pas disposer de droits si quelqu’un d’autre n’a pas rempli ses obligations. Car qui dit droits dit devoirs.

Bien sûr que je crois en notre système qui protège. Et que nous devons tout faire pour le préserver.

Et que nous soyons organisés de telle sorte que ceux qui en ont le plus besoin puissent justement bénéficier de cette solidarité collective. Et au cours de mon mandat, c’est ça que je cherche : aller trouver celles et ceux qui, pour le coup, ne demandent rien, et qui eux, le pourraient. Mais qui, avec pudeur, se battent. En silence.

Là, nous devons jouer notre rôle. Pour qu’eux aussi embarquent sur le bateau que nous construisons tous.

Les défis auxquels nous sommes confrontés nous imposent à tous cette responsabilité.

Vous vous rendez compte ? Moins de la moitié de la population mondiale vit aujourd’hui dans une démocratie.

Et il ne s’agit plus que des pays qui n’ont jamais eu de tradition démocratique : c’est même le contraire. D’anciennes démocraties « sombrent ». A nos portes, au cœur même de l’Europe : la Hongrie, la Pologne, l’Italie, la République tchèque, l’Autriche… ce sont des dirigeants illibéraux, conservateurs, antisystèmes et populistes.

Et évidemment, outre-atlantique. La réélection de Donald Trump doit profondément nous questionner. Et nous réveiller. Sitôt investi, les premiers décrets qu’il signe sont alarmants : la grâce pour les 1 500 émeutiers du Capitole, le retrait de l’organisation mondiale de la santé et la sortie des accords de Paris pour pouvoir forer à tout va et doper la production d’hydrocarbures. Sans compter ses ambitions hégémoniques sur le Groenland… pour ne citer qu’elle. Le Groenland c’est un pays constitutif du Danemark qui fait partie de l’Union européenne.

Alors quelles réponses apporter ? Comment être forts face à ces menaces de soumission, de diktat et de vassalisation ? 

La première des réponses, pour moi, est incontestablement l’Europe. C’était d’ailleurs le thème de ma toute première cérémonie de vœux, à Neuville, en 2018.

Face à ces risques de toute nature, face aux Etats qui ont des volontés d’expansion de leurs puissances, dans tous les domaines – je pense aussi par exemple à la Chine qui vient de franchir le cap des 1 000 milliards d’excédent commercial – nous ne devons pas être naïfs. Et nous devons être capables de défendre ce que nous sommes, en matière de droits, de respect de l’autre et d’universalisme.

C’est le retour de la loi du plus fort. L’Europe doit défendre ses intérêts partout, tout le temps. 

C’est aussi à l’Europe de se doter d’un arsenal coercitif pour mener la lutte contre la désinformation et la haine qui se propagent sur tous nos réseaux sociaux. C’est elle qui doit tordre le bras de tous ces géants sans foi ni loi qui ne jurent que par le Roi Argent quitte à manipuler nos élections et à entraver nos processus électoraux. Cela s’est passé il y a un mois en Roumanie. Parce que le débat public est un trésor fragile, il est impensable qu’il puisse être délocalisé sur des plateformes soumises au seul contrôle de milliardaires américains ou chinois.

L’Europe doit s’affirmer sans aucune inhibition ni sans aucun complexe. 

L’Europe est une grande puissance qui s’ignore encore alors qu’elle dispose de capacités considérables. Et face aux nouveaux désordres mondiaux, face au retour des logiques d’empire, elle doit se révéler comme telle, une grande puissance. Tout en restant fidèle à ce qui a permis une organisation équilibrée des échanges, fondée sur le droit plutôt que sur la force, mais en affirmant notre propre puissance pour être crédible lorsque nous défendons le droit.

L’Europe a longtemps incarné l’ancrage et l’irréversibilité de la démocratie. Qu’elle ne devienne pas la cible de tous ceux qui prônent le repli sur soi. L’Europe est résolument une des réponses pour lutter contre les différentes menaces et pour protéger nos valeurs. Alors certes, elle est encore imparfaite. Mais regardez les Britanniques : 68% d’entre eux regrettent le Brexit et souhaitent réintégrer notre Union.

Une autre réponse, pour lutter contre ceux et ce qui nous menacent, autre réponse, plus importante peut-être encore, c’est immanquablement l’éducation.

« L’ignorance est un crépuscule, le mal y rôde. Songez à l’éclairage des rues, soit, mais songez aussi, songez surtout, à l’éclairage des esprits » nous enseigne Victor Hugo.

Éclairer les esprits. C’est ce qui distingue fondamentalement les démocraties des autres régimes, qui préfèrent embrigader dès le plus jeune âge. Ne lâchons rien sur l’éducation de nos enfants, de nos jeunes.

Et faisons-leur confiance, à nos jeunes !

Car c’est bien notre jeunesse qui est la France de demain. Qu’il est aisé de les critiquer, nos jeunes, parce que nous nous retrouvons avec difficultés dans leurs habitudes. Mais quelle génération n’a pas dit « ah ! de mon temps… » ou « c’était mieux jadis ».

Notre jeunesse nous défie. Et c’est tant mieux. Sur tant de sujets. 

Sur le sens qu’on donne à nos vies.

Et sur la protection de notre planète en particulier.

Que ne lui donnons-nous pas raison ?

Très récemment, regardons le paysage de notre climat. Les inondations meurtrières en Espagne, fin octobre. Et plus près de chez nous, en octobre également : dans le sud du Rhône, à Givors. Des rues englouties. Des montagnes de déchets entassés. Des maisons détruites. Des vies meurtries.

Les feux apocalyptiques en Californie, depuis début janvier. Ces hectares consumés. Des quartiers entiers rayés de la carte. Et l’homme qui ne peut que constater, dramatiquement impuissant, la vie qui se consume.

Et ce terrible cyclone qui a ravagé Mayotte en décembre. J’ai une pensée profonde et émue pour nos compatriotes mahorais. Qui n’avaient déjà pas grand-chose et qui n’ont plus rien. Moins encore. Plus d’hôpital, plus d’école, plus d’abris de fortune. Je m’étais rendue à Mayotte, en mai dernier. Et j’ai découvert une île qui regorge de merveilles, avec des Français de l’autre bout du monde qui se sentent oubliés. Mais qui font aussi partie du cœur battant de notre République.

Sur ce sujet non plus, ne nous déchirons pas. Ne prônons pas de solutions simplistes ou dogmatiques. Unissons-nous pour venir en aide aux Mahorais et leur apporter les solutions dont ils ont tant besoin.

Chers jeunes, bousculez-nous. Interpellez-nous. Mettez toute votre fougue dans de grands desseins universalistes. Et emportez-nous, embarquez-nous avec vous.

Ecoutez ce que disait Pierre-Mendès France, dans son message à la jeunesse, de 1955 :

« Puisque chacun des grands problèmes de la communauté nationale atteint la jeunesse plus gravement et plus profondément que quiconque, il importe qu’ils soient pris, étudiés, résolus en pensant à elle, en pensant à vous. Oui, penser constamment à vous, c’est la seule manière de construire toujours en fonction du futur, c’est la seule méthode pour être certain de ne jamais sacrifier l’avenir au présent, ce qui est en définitive le devoir suprême de l’homme d’État.»

Et Pierre-Mendès France poursuit ainsi :

« L’efficacité du régime républicain, du régime de liberté, ses chances de survie et de prospérité dépendent donc des liens qu’il saura créer entre la jeunesse et lui. Si notre République est capable de s’adapter, si elle est capable de comprendre l’espérance des filles et des garçons de France, d’épouser cette espérance, de la servir dans chacune de ses décisions, alors elle n’aura rien à craindre des aventuriers, des démagogues, des extrémistes, car elle sera toujours plus forte et plus vivante, portée par sa jeunesse, ardemment défendue, et chaque jour renouvelée par elle.

Jeunes hommes et jeunes femmes de France, 

N’hésitez pas à prendre part à la vie politique, qui sans votre inspiration risquera toujours de retomber dans les vieilles ornières.»

Alors que nos jeunes façonnent leur avenir. Et le nôtre. Qu’ils courent aussi les risques pour nous. Portons-les. Ne les entravons pas. Éclairons-les. Et donnons-leur l’espérance, « qui est un risque à courir », nous dit Bernanos.

Soyons attentifs, très attentifs à nos jeunes. Il y a quelque chose que je trouve d’ailleurs nettement préoccupant, aujourd’hui. Questionnez nos jeunes : vous verrez qu’ils souhaitent de moins en moins avoir d’enfants. Et c’est terrible ! En 2024, ce sont 170 000 naissances en moins, soit plus de 21% qu’en 2010. Cette baisse de natalité sans précédent et continue devrait tous nous alerter. Bien sûr, cela a un impact considérable sur notre système économique et social qui repose en priorité sur la solidarité intergénérationnelle. Mais ça signifie aussi et surtout que nos jeunes ont si peu confiance en l’avenir qu’ils préfèrent ne pas faire prendre de risques aux générations futures.

Chers jeunes, chers… moins jeunes,

C’est vous  qui m’inspirez. 

Je vous vois, partout, toujours, tous…

Je vous vois, je vous rencontre dans mes permanences dans les différentes mairies qui m’accueillent quand vous me demandez un rendez-vous.

Je vous rencontre à vos fêtes de villages, à vos matchs et tournois sportifs, aux inaugurations, aux cérémonies plus officielles de vos communes (Sainte-Barbe, vœux, commémorations du 8 mai, du 11 novembre…).

Je vous rencontre à mes apéros-débats que j’organise chaque mois dans les différentes communes… Et je vous vois aussi dans mon quotidien, quand je fais mes courses, mon marché, quand j’ai besoin d’un livre à la librairie du coin, quand j’accompagne mes enfants à leurs activités : car je vis simplement parmi vous !

Être député, c’est être la courroie de transmission entre « en bas et en haut » comme j’ai coutume de dire.

Donc j’ai besoin de vous, j’ai besoin de toute la « matière » que vous me donnez, dans tous les domaines, pour vous représenter le mieux possible.

Vous savez, je ne suis pas plus omnisciente que vous ! Alors j’ai besoin d’apprendre, de comprendre. Et pour cela, ma méthode, elle est simple, c’est d’aller vous rencontrer, où vous êtes.

Et vous écouter. C’est pour cela que je vais dans vos usines, dans vos casernes, dans vos champs, dans vos mairies, dans vos associations, dans vos gendarmeries, vos entreprises, dans vos clubs, dans vos hôpitaux, dans vos salles de classe.

Parce que tout ce que vous me dites, même quand vous râlez – je ne vais pas dire : surtout quand vous râlez – mais vos doutes, vos colères, vos incompréhensions, vos questionnements, vos attentes, elles sont ô combien légitimes.

Et ce que je cherche à faire, depuis maintenant presque huit ans, c’est d’extraire ce qui fait le cas plus ou moins particulier pour aller vers quelque chose de plus collectif ; c’est, à partir des difficultés que vous me relatez, d’essayer de transformer cela pour nous.

Ecouter, échanger, partager. Et avancer. Embarquer. Ensemble.

Parce que « faire de la politique », ce n’est pas un « gros mot », loin de là ; et ce n’est pas non plus traiter de l’individuel pour l’individuel. Parce que « faire Nation », « faire société », « vivre ensemble », des termes galvaudés mais qui sont pourtant si beaux… et si nécessairement absolus, ce n’est pas une somme d’individualités.

Bien au contraire. C’est chercher, au-delà de chacun de nous, ce qui nous transcende. Tous ceux qui flattent les egos de chacun sont des irresponsables politiques. La Politique, avec un grand « P », c’est s’occuper de la vie de la Cité. N’oublions quand même pas l’étymologie de « politique » qui vient du grec « polis », Cité, c’est-à-dire une communauté de citoyens libres et autonomes, l’expression de la conscience collective.

Cité, donc, dans laquelle chacun doit naturellement avoir sa place. Ainsi tous ceux qui font le jeu communautaire par exemple, en exacerbant ce qui, dans l’individu, s’oppose au collectif, à notre société, au faire Nation ; tout ce qui ne tend pas vers notre Universalisme, tous ceux qui clivent, qui montent les uns contre les autres, c’est l’exact opposé de ma conception de la politique. L’opposé de ma conception mais surtout l’opposé de mon engagement et de sa raison d’être.

Car oui ! Oui, faire de la politique, au sens noble du terme, c’est se battre pour le collectif. C’est se battre pour une certaine idée de l’Universalisme. Et de la Fraternité. C’était le thème de mes vœux à Quincieux en 2023.

Et c’est se battre, évidemment, pour ne laisser personne au bord de la route de ce collectif. Parce que croire au collectif, ce n’est pas diluer et oublier les membres de ce collectif. Ceux ici qui sont par exemple entraîneur d’équipe de foot, de rugby, de volley ou de tout autre sport collectif : vous le savez parfaitement ! C’est une équipe qui gagne. Parce que chacun de vos joueurs a sa place. 

Alors il y a ceux qui revendiquent, qu’on entend, un peu, beaucoup,  parfois peut-être un peu trop. Et il y a ceux qu’on n’entend jamais. Qui ne font pas parler d’eux. Qui avec abnégation, se battent. Pour mettre de quoi manger dans l’assiette de leurs enfants. Pour les éduquer le mieux possible. Et faire 3, 4 « petits boulots », en se levant à 4h du matin. Et là, notre rôle, c’est de prendre la main. D’accompagner. Et de donner une place dans notre collectif. 

Christian Bobin, un écrivain récemment décédé – si vous ne le connaissez pas : courez le lire, c’est un enchantement –, écrivait « La vraie force, c’est celle qui sait prendre soin de la fragilité. Être fort, ce n’est pas écraser les autres sous le poids de ses certitudes ou de ses ambitions. Être fort, c’est être capable de douceur dans un monde qui ne l’est pas. C’est accueillir le doute, le vide, le silence et continuer à avancer, sans jamais céder à l’amertume. La vraie force est invisible, elle se niche dans les gestes simples, dans les regards bienveillants, dans la patience des jours ».

Alors, en ces temps politiques qui, tant au niveau international qu’au niveau national ou local, peuvent parfois laisser penser qu’être fort, c’est ne penser qu’à soi et surtout bien écraser l’autre, je souhaite, je vous souhaite, je nous souhaite :

De prendre soin de la fragilité, celle des autres. Et la nôtre, aussi.

De ne succomber ni à nos certitudes ni à nos ambitions mais bien d’accueillir le doute, le vide et le silence.

D’être doux et plein d’espérances, d’être patients et bienveillants dans chacun de nos gestes.

Avant de finir de vous transmettre mes vœux pour cette année qui s’ouvre à nous, permettez-moi de formuler quelques remerciements, du fond du cœur :

Merci à ceux, et vous êtes nombreux, qui m’accompagnent depuis plusieurs années dans cette merveilleuse aventure.

Merci à ceux qui me, qui nous rejoignent en cours de route.

Vous savez, on dit souvent qu’on ne se fait que des ennemis en politique : c’est faux. Les rencontres que nous sommes amenés à faire peuvent aussi être vraies, profondes et puissantes. Profondément humaines.

Merci à mon équipe de collaborateurs qui sue à grosses gouttes depuis quelques jours pour faire en sorte que cette soirée se déroule sans anicroche. Béatrice, Olivier, Céline, Mathéo : sans vous, je ne pourrai pas mener mon mandat comme je le fais. Merci aussi à Lalie, stagiaire qui est arrivée en plein préparatifs et qui a sacrément mis la main à la pâte. Eh oui, nos jeunes sont extra.

Et merci à mes proches, mes tout proches, qui me portent et me supportent, dans cet engagement. Merci à toi, qui a si vite pris le pli des horaires nocturnes, des soirées qui n’en sont pas, des week-ends qui n’en sont pas plus, et qui, l’été dernier, lors de cette dissolution surprise, n’a pas hésité à s’improviser « merguézier en chef » – tous ceux concernés comprendront –. Pour reprendre et filer la métaphore maritime qui nous a guidée pendant ce discours et qui te va si bien : tu es mon phare.

Merci à mes trois enfants, qui non seulement sont à mes côtés depuis presque 8 ans maintenant, qui subissent aussi mes absences mais qui sont fiers de leur maman, qui m’encouragent sans cesse à continuer, et qui sont d’une exigence redoutable, en particulier lors de mes prises de paroles – et ils ont raison. Merci mes grands chéris et continuez de me faire courir des réunions parents-profs en hémicycle, de ramener des copains à la maison alors que je ne suis pas censée être là de la soirée, de m’appeler quand je suis au bureau pour vous aider à résoudre un obscur problème de maths : j’ai les pieds sacrément enracinés grâce à vous.

Merci à vous tous ici présents ce soir, qui avez accepté d’embarquer avec moi.

Avant de terminer, et pour passer à 2025 sous les meilleurs auspices, 

Je vous souhaite, je nous souhaite, des fleurs qui embaument nos matins, des musiques qui apaisent nos soirées ;

Je nous souhaite des pas de danse qui dessinent un sourire sur nos visages et des rayons de soleil qui illuminent nos pensées ;

Je nous souhaite des promenades en forêt et des balades sur 

la plage ;

Je nous souhaite des échanges passionnés et passionnants ; 

et apaisés et apaisants,

Je nous souhaite de l’entrain, de l’envie, des rêves et des réussites ;

Je nous souhaite le feu sacré pour déplacer les montagnes ;

Je nous souhaite de la force et de l’apaisement ;

Et des tourbillons de sérénité ;

Et des déferlements de paix ;

Je nous souhaite d’avancer avec courage sur le chemin qui est le nôtre, individuellement, et collectivement ;

Et je nous souhaite de brûler de ce désir de la mer, de construire NOTRE bateau pour que nous embarquions, tous ensemble.

Je vous remercie.